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Écrit par
2 mars 2020

La crise de la vanille dans le monde

Les fluctuations des prix des aliments sont courantes et la vanille n’y échappe pas cette saison-ci. Beaucoup de choses sont racontées dans les médias, mais peu de ces histoires s’approchent vraiment de la réalité, car cette crise est multifactorielle, d’une part ; et qu’elle affecte différemment les acteurs de la filière que l’on soit producteur, collecteur, exportateur ou négociant, et où que l’on soit le monde.

LA VANILLE VERTE

Le facteur le plus important de cette crise est la vente de vanille verte. Plus que 90 % de la vanille dans le monde est maintenant vendue verte, c’est-à-dire immature. La raison, répondre aux impératifs des industriels producteurs d’extraits. Lorsqu’elle est vendue verte, elle regorge d’eau et pèse cinq fois plus lourd qu’après la longue transformation.

Par ailleurs, la transformation telle qu’effectuée à Madagascar demande près de huit mois de délais avant sa mise en marché. Un délai au cours duquel la vanille subit une série de phases ; échaudage, étuvage, séchage, ainsi que des manipulations quasi journalières pour arriver à un affinage exquis qui porte les gousses de vanille à des sommets gastronomiques. Pourtant ces trésors ont été dépassés en valeur marchande par les prix de la vanille verte qui s’achetaient 200 $/US le kilo au cours des années. Pourquoi tant travailler alors que la vanille verte, ramassée à la grappe et sans aucune transformation, est vendue à ce prix ? Plus de détails sont développés sur mon blogue, mais gardons en mémoire que c’est la transformation à l’étranger de la vanille qui a déconstruit l’économie malgache et a porté une atteinte grave à la qualité de la vanille actuellement sur le marché.

Heureusement pour nous, il existe partout dans le monde, à Madagascar comme ailleurs, des artisans passionnés de vanille qui continuent malgré tout de réaliser eux-mêmes la transformation de la vanille, conscients de l’importance de préserver le savoir dans les pays producteurs pour soutenir la structure économique du pays, et pour le plaisir de nos papilles.

Madagascar

En ce qui concerne la fameuse vanille de Madagascar, l’important est de savoir comment, et à quel moment réaliser ses achats de façon à profiter des meilleurs prix. En effet, afin de lutter contre la contrebande, le gouvernement malgache a mis en place par décret un système de gestion de l’offre qui consiste en l’ouverture de ses portes à l’exportation seulement entre le 15 octobre et le 31 mars… Un peu comme le crabe ou le homard au Canada. 

Les variations importantes de prix se produisent près des dates d’ouverture de la campagne, et surtout, près des dates de fermeture de la saison. Il sera donc important de planifier les achats annuels avant le mois de février pour éviter les bousculades des retardataires.

Pour les professionnels qui souhaitent un approvisionnement régulier à l’année, certains de mes fournisseurs produisent de plus grands stocks de vanille comme la Koperativa Lovasoa, (plus bas) une coopérative très bien structurée. Leurs vanilles sont de qualité exceptionnelle avec son goût fumé et chocolaté caractéristique de Madagascar, son taux intense de vanilline (2 %), et ses notes de figues en fin de bouche.

Du haut de son savoir-faire de plus de 150 ans, les producteurs consciencieux de Madagascar offrent encore la plus recherchée des vanilles, qu’il nous fait plaisir de vous offrir via Hector Larivée.

La koperative Lovasoa compte trois cents familles de producteurs de vanille dans la région de Sava.

Ouganda

Si toutefois les dates de la campagne 2019-2020 de Madagascar ne vous accommodent pas, d’autres fournisseurs de Colibri Vanille peuvent aussi offrir du volume sans être ennuyés par les dates obligatoires de campagne, tel que l’association de producteurs en voie de certification biologique EAN Organics en Ouganda. 

Ce nouveau pays exportateur de vanille ne déploie de filière vanillière que depuis seulement le début des années 2000. Il bénéficie d’un terroir très propice à la croissance de la plante vanilla planifolia, car elle se développe actuellement avec force et sans atteinte d’aucune maladie. La seule difficulté de l’Ouganda est de ne pas avoir de tradition culinaire utilisant la vanille, ce qui les obligeait autrefois à avancer à tâtons dans leur recherche de qualité.

Heureusement, grâce à la merveilleuse Monica Nayebare, coordonnatrice de l’association, nous collaborons étroitement avec eux afin d’augmenter leurs chances d’obtenir de meilleurs prix en observant les plus hauts standards internationaux.

Bien qu’encore inégale, la production de vanille d’Ouganda est très saine. Son parfum peut être sincèrement déconcertant avec son arôme de cuir et de foin, mais en bouche, sa délicatesse est absolue : chocolatée, florale, vanilline d’intensité moyenne (1,9 %) mais très respectable. Un bonheur.

Monica Nayebare, coordonnatrice de l’association EAN Organics en Ouganda

Indonésie – Tahitensis

Le travail qu’arrive à faire Indah Arnaelis en Indonésie est phénoménal. Cette jeune surdouée de 27 ans est déjà à la tête de plusieurs petites plantations dans la région de Tangerang, près de Jakarta. Universitaire diplômée en développement international et fille d’agriculteurs, elle développe méthodiquement depuis quatre ans plusieurs petites plantations de planifolia et de Tahitensis avec une rigueur admirable. Le lot de Tahitensis qu’elle nous avait offert à l’automne 2019 était à ma connaissance, la plus aromatique que j’aie connue, avec son taux de vanilline exceptionnel de 2 %, quand la plupart des Tahitensis obtiennent rarement des taux plus élevés que 1,5 à 1,6 %.

Notez bien cette magnifique signature pyrographique lorsqu’elle reviendra sur nos côtes en septembre prochain !

Actuellement, le nouveau lot Tahitensis qu’elle nous a expédié affiche un taux de vanilline tout de même supérieur à la moyenne, 1,7 %, et vous étonnera avec ses notes exotiques qui évoquent l’eucalyptus, de gingembre et de citron confit.

Indonésie – Planifolia

Indah n’a pas fini de nous étonner, car sa production de planifolia est si noire, si grasse et si charnue, qu’elle dépasse toutes les planifolias des nouvelles terres vanillière en termes de qualité et de saveur. Ses gousses de vanille contiennent une quantité énorme de caviar bien parfumé de cacao, de réglisse noire, d’épices et de raisins secs.

Sa saveur épicée est des plus indiquées pour les recettes salées de gibier, et de poissons à la crème.

Au-delà de la recherche de saveur la plus envoûtante, du plus suave parfum de vanille, il y a une rencontre avec d’autres humains, passionnés impénitents de la mystérieuse orchidée. Une fusion sans laquelle la vanille n’existerait tout simplement pas. Car après la pollinisation manuelle appelée « mariage », et le neuf mois du murissement de son fruit, ce n’est que là que débute la véritable aventure.